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Gaston Fébus : un prince occitan
Centre interrégional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)
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Gaston III comte de Foix et Vicomte de Béarn est entré dans la légende sous le nom et la graphie occitane de Febus.
Dans le contexte tumultueux de la Guerre de Cent Ans (1337-1453) qui oppose royaumes de France et d'Angleterre, il marque son temps par son sens aigu de la politique et son amour des arts et des lettres. Si l'on retient surtout les faits d'armes de ce stratège militaire, le faste de sa cour et les débordements de son caractère, Fébus eut également un rôle prépondérant sur le développement de la langue et de la culture occitanes au XIVe siècle.
Fin connaisseur de l'occitan dans sa variante béarnaise comme de l'occitan littéraire forgé par les troubadours, il fait de sa langue maternelle un outil politique lui permettant d'asseoir son pouvoir sur l'ensemble de la population de ses domaines. La langue occitane est également pour lui un agent de développement culturel, notamment dans le domaine scientifique.

 

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Eyraud, Noémie
Gaston III (1331-1391) comte de Foix et vicomte de Béarn accède au pouvoir en 1343 à la mort de son père, Gaston II. Il est encore trop jeune pour gouverner, sa mère Aliénor de Comminges occupe donc la fonction de régente. Ses terres s’étendent autour de Foix pour le comté et de Tarbes, Pau et Mont-de-Marsan pour la vicomté. Elles côtoient celles du roi de France Philippe VI de Valois, du roi d’Angleterre Edouard III et de la couronne d’Aragon, dans le contexte de la Guerre de Cent ans (1337-1453). L’habileté stratégique et politique de Gaston épargne à son peuple les massacres de la guerre.

Le comte veut conserver la souveraineté sur son territoire. Il justifie son autorité et son autonomie d’abord en se déclarant seul souverain de Foix et de Béarn mais aussi en affirmant les spécificités locales, maintenant ainsi à distance l’organisation politique, administrative, sociale et linguistique du royaume de France.

Deux des principes fondamentaux de son administration sont donc d’une part la conservation des traditions juridiques déjà en place mais aussi l’usage de la langue occitane dans l’exercice de son pouvoir. La vie sociale du Béarn dépend depuis des siècles des Fors de Béarn, textes de droits et privilèges reconnus à la population, rédigés en occitan et qui avaient une véritable valeur législative.

En ce qui concerne la langue, on parle majoritairement gascon sur l’ensemble du domaine mais aussi languedocien sur une partie du comté de Foix. Pour se faire comprendre dans tout le domaine, Gaston Fébus dont la langue maternelle est le béarnais, s’exprime en occitan, qui est donc la langue parlée au quotidien et à la cour, langue de l’administration et du pouvoir. Une documentation officielle conséquente rédigée en occitan est parvenue jusqu’à notre époque. Cependant, Gaston est un aristocrate lettré et cultivé : il maîtrise tout aussi bien le français et le latin.

Les arts à la cour

Le faste de sa cour est à la hauteur de sa noblesse : les arts y ont une place d’honneur.

Les musiciens et jongleurs qui circulent en Europe viennent à la cour de Gaston, faisant de celle-ci un centre de diffusion des nouveaux courants polyphoniques : l’Ars Nova et l’Ars Subtilior. Les derniers troubadours y sont volontiers accueillis : Gaston apprécie beaucoup leur lyrique et il est possible qu’il se soit lui-même essayé à la composition. On lui attribue deux chansons, bien que la paternité ne soit pas attestée. La première est une canso : « Canso de mossen Gasto comte de Foix per la qual gazaynet la joya a tholoza ». La seconde attribution qu’on lui prête, populaire et un peu hasardeuse, est le Se canta (aussi connu sous le nom d’Aquelas Montanhas). Les lettres et les sciences trouvent leur place dans la bibliothèque de Gaston Fébus, qui contient notamment une traduction de la Chirurgie d’Abulcasis, oeuvre fondamentale de médecine d’origine arabe, et une traduction en occitan du De proprietatibus rerum (l’Elucidari en occitan) de Barthélémy l’Anglais, ouvrage encyclopédique sur les choses (éléments de la Création). On y trouve aussi les deux livres que l’on doit à Gaston lui-même, qu’il n’a pas écrits en occitan mais en français. Le Livre des Oraisons est un livre de prières très personnel, et le Livre de chasse, oeuvre remarquable et remarquée, est restée une référence en matière de vènerie.

Le mythe Gaston Fébus

On lui doit en partie le mythe forgé autour de son propre personnage. Gaston Fébus avait le don de mettre en valeur sa personnalité, mais d’autres après lui ont entretenu ce mythe. Sa postérité a été aidée par les Chroniques de France, d’Angleterre et des pays voisins de Jean Froissart. Le nom de Gaston Fébus est resté associé à la noblesse savante, grâce notamment à son Livre de Chasse qui était encore une référence dans la discipline des siècles après son écriture.
Au XIXe siècle, après l’avènement d’un intérêt croissant pour le Moyen Âge et les troubadours, la volonté d’ancrer la renaissance occitane dans une perspective historique prestigieuse amena des félibres béarnais à se réapproprier la figure mythique de Gaston Fébus.